Character.AI : Droit d’auteur et attentes des utilisateurs

Character.AI : Droit d’auteur et attentes des utilisateurs

L’essor des IA génératives pose de plus en plus de questions sur l’usage légal de données protégées par le droit d’auteur dans l’entraînement de ces modèles. Character.AI, fondée par Noam Shazeer et Daniel de Freitas, deux anciens ingénieurs en machine learning de Google, a été lancée en septembre 2022. Son concept ? Permettre aux utilisateurs d’interagir de manière créative avec des personnages d’IA, en particulier dans les domaines de la fanfiction et du jeu de rôle.

Depuis son lancement, Character.AI a connu une croissance fulgurante : plus de 20 millions d’utilisateurs et environ 169 millions de visites par mois en 2023, une progression dépassée uniquement par ChatGPT. Cette adoption rapide reflète une forte demande pour des expériences immersives de narration. Character.AI, en redéfinissant les interactions au sein des communautés en ligne, s’est affirmée comme une plateforme incontournable, en particulier auprès des 18-24 ans, grâce à des innovations et un engagement solide de ses utilisateurs.

Quand les jeux de rôle deviennent dangereux

Malgré la diversité des usages offerts par Character.AI — de la création littéraire au codage en passant par la traduction —, c’est l’accès à un large éventail de personnages protégés par des droits d’auteur et de figures fictives qui a propulsé sa popularité. Ces personnages, capables de se souvenir des conversations précédentes, ajoutaient une dimension immersive au jeu de rôle, captivant les utilisateurs.

Cependant, la plateforme a rapidement été confrontée à des défis majeurs. Parmi eux, des jeux de rôle romantiques explicites impliquant des mineurs et des questions de droits d’auteur. Ces préoccupations ont atteint un point critique avec l’affaire Sewell Setzer : un adolescent de 14 ans décédé, dont la mère a intenté un procès contre Character.AI, l’accusant de ne pas avoir mis en place des protections suffisantes pour les utilisateurs mineurs, qu’elle tient responsables de cette tragédie.

Le défi des droits d'auteur

Le procès a mis en lumière des préoccupations croissantes quant aux risques de dépendance émotionnelle aux personnages d’IA. Il a également soulevé des questions juridiques complexes autour de la propriété intellectuelle, car Character.AI propose des interactions avec des personnages protégés par des droits d’auteur sans autorisation des ayants droit.

Bien que le cadre légal reste incertain, Character.AI a pris des mesures préventives, notamment en limitant l’accès à certains personnages sous copyright et en supprimant certains profils de son système. Cependant, de nombreux personnages populaires restent accessibles. Par exemple, les bots de personnages emblématiques cumulent des millions d’interactions :

  • Boa Hancock de One Piece : 22,9 millions de chats.
  • Son Goku de Dragon Ball : 30,9 millions de chats.
  • Sasuke Uchiha de Naruto : 47,1 millions de chats.
  • Harry Potter : le bot le plus populaire atteint 50,6 millions de chats.
  • Mikasa Ackerman de Attack on Titan : 52,6 millions de chats.

Ces chiffres illustrent l’attachement émotionnel des utilisateurs à ces personnages, mais posent également la question : jusqu’où peut aller Character.AI dans l’utilisation de contenus sous copyright sans violer la législation ?

Utilisateurs pas si satisfaits

Le subreddit de Character.AI, qui rassemble aujourd’hui 1,7 million d’abonnés, témoigne de l’engagement intense de sa communauté. L’activité y est constante, et les utilisateurs expriment fréquemment leur frustration face à la suppression de certains personnages, particulièrement ceux protégés par des droits d’auteur. Pour beaucoup, ces personnages étaient l’attrait principal de la plateforme.

L’inquiétude va au-delà du simple mécontentement : la communauté espère désormais que Character.AI communiquera à l’avance sur les suppressions futures pour permettre aux utilisateurs de sauvegarder leurs conversations. Ces demandes soulignent l’attachement émotionnel fort des utilisateurs envers leurs interactions avec ces personnages d’IA, un aspect central pour le succès de la plateforme.

Entrer dans le futur

Character.AI évolue dans une zone grise, entre utilisation équitable et violation des droits d’auteur. Plusieurs poursuites ont déjà visé des développeurs pour l’utilisation d’images protégées lors de l’entraînement de modèles d’IA, ce qui laisse penser que les entreprises pourraient bientôt étendre leur surveillance aux données de sortie de ces outils. Pour garantir sa pérennité et sa conformité juridique, Character.AI devra répondre à ces enjeux au fil de son développement.

 

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Détection des Tendances TikTok : Le Cas Picard

Détection des Tendances TikTok : Le Cas Picard

Si l’augmentation rapide de ses téléchargements et de sa renommée est remarquable, la route de TikTok pour se hisser au sommet des réseaux sociaux a été jalonnée de défis, jusqu’à devenir la première application non-Meta à franchir le cap des 3 milliards de téléchargements. Mais ce qui retient particulièrement l’attention, c’est l’intégration de TikTok dans la vie quotidienne des consommateurs, un phénomène que nous nommons aujourd’hui « l’effet TikTok ».

 

Tendances TikTok : un impact important sur l’économie européenne

TikTok a démontré à maintes reprises son rôle significatif dans les phases de découverte, de considération et d’achat auprès des consommateurs. Cet impact économique s’observe tant au niveau des grandes entreprises que des petites et moyennes entreprises (PME). En effet, TikTok a été particulièrement influent pour les PME, ayant contribué 4,8 milliards d’euros aux économies de cinq pays européens majeurs (Allemagne, France, Italie, Pays-Bas et Belgique) en 2023. Depuis son introduction en Europe en 2018, TikTok a connu une expansion rapide, atteignant plus de 134 millions d’utilisateurs mensuels au sein de l’Union européenne.

En France, son impact a été particulièrement marquant, avec une contribution de 1,4 milliard € au PIB et à 12 500 emplois.

TikTok s’est révélé être un outil essentiel pour les entreprises françaises désireuses de se redresser après les défis engendrés par la pandémie COVID-19, aidant ainsi les entreprises de toute taille à accroître leur visibilité, à se développer et à renouer avec une croissance économique.

 

Le cas Picard : des tendances TikTok à la rupture de stock

Les utilisateurs de TikTok partagent fréquemment des contenus, entraînant un flux continu de produits qui deviennent « la prochaine grande tendance ». Être capable d’identifier un produit, voire un secteur entier, qui devient viral sur TikTok peut entraîner une hausse significative des ventes, une reconnaissance accrue de la marque et même des innovations produits pertinentes. Un enchaînement continu de ces tendances peut également favoriser l’expansion de la marque, la nature virale de la plateforme alimentant sa dynamique de croissance.

En France, Picard en est un parfait exemple, ayant déjà observé une augmentation notable de ses ventes grâce à « L’Effet TikTok » pour divers produits depuis 2021. En écoutant les retombées autour de l’enseigne, on identifie de nombreux cas où des produits ont capté l’attention des utilisateurs de TikTok.

Par exemple, en octobre 2022, TikTok a été essentiel dans le succès fulgurant de la grande madeleine de Picard. Ce produit, qui a rapidement séduit le public, a gagné en popularité grâce à une série de vidéos qui le mettaient en avant. La plateforme étant inondée de contenus “testant” la madeleine, certaines vidéos ont atteint des millions de vues, ce qui a eu un impact direct sur les ventes : la grande madeleine s’est écoulée à un rythme effréné, entraînant des ruptures de stock dans plusieurs points de vente.

La capacité de TikTok à transformer un produit simple, mais de qualité, en un véritable phénomène de consommation grâce à un effet boule de neige est impressionnante. Néanmoins, pour en maximiser les bénéfices, il est essentiel de détecter ces tendances le plus tôt possible. Les exploiter pour optimiser les stratégies marketing et les chaînes de distribution permet à la marque de démultiplier leur impact ; tant sur le comportement d’achat des utilisateurs, qui se précipitent pour acquérir et partager leur expérience, que sur les conséquences après la disparition de la tendance.

 

@poopiblh Réponse à @S`´º Maxi madeleine Géante à partager !! Fourrée caramel beurre salé ✨ #food #dessert #caramel #madeleine #foodies #folie #miam #fyp ♬ son original - Poopi Blh

 

Une Histoire de Fromages : des Opportunités Manquées ?

@simplekeysha Oh mon dieu @Picard Surgelés vous etes trop forts #burrata #foodtok #foodlover #pourtoii ♬ son original - Keysha

Picard a pu tirer parti de la détection d’une tendance sur TikTok avec le lancement de sa gamme italienne « Ciao Italia ». Malgré l’engouement généré autour de cette gamme, nous voyons que l’enseigne a seulement capitalisé sur la visibilité offerte par la viralité d’un des trois produits. La burrata al forno était le produit initialement mis en avant par la marque et est devenue une sensation sur TikTok, grâce à une vidéo virale où la créatrice poopiblh partage son expérience gustative, actuellement visionnée par plus d’un million de personnes. Les contenus liés à ce produit ont généré 1,8 million de vues et 88,7 K de likes, avec plus de 11,5 K de partages et 577 commentaires.

Cependant, la folie autour de la gamme « Ciao Italia » ne s’est pas arrêtée à ce seul produit. Bien que le contenu relatif à la burrata al forno soit très visible, les gnocchis farcis à la stracciatella ont aussi capté l’attention du public. Les vidéos associées à ce produit ont été vus plus de 3,9 millions de fois, engendrant plus de 235,6 K de likes. Cette tendance TikTok a été fortement relayées et commentées : 1,1 K de commentaires et 82,9 K de partages, doublant ainsi les métriques du produit mis en avant par l’enseigne au minimum (vues et commentaires) et obtenant sept fois plus au maximum (likes et partages).

Or ces « gnocchis » n’ont fait qu’une simple apparition dans une des vidéos de l’enseigne, et l’autre produit populaire de la campagne, les boules de mozzarella à la truffe, qui a aussi généré un fort intérêt sur TikTok, n’a pas du tout été exploité.

Ne pas inclure ces produits dans la communication officielle sur TikTok constitue une occasion manquée. Une meilleure mise en lumière des tendances TikTok les plus populaires permet d’amplifier l’enthousiasme autour des produits, maximiser l’engagement des consommateurs et contribuer à l’augmentation des ventes.

 

 

La détection rapide des tendances sur TikTok devient essentielle pour avoir un impact sur votre business

Elle permet aux marques de saisir des opportunités susceptibles d’optimiser leur stratégie marketing et communication multi-canal. Le cas d’étude Picard illustre bien que repérer les tendances est crucial pour mettre en place des actions pertinentes, tant sur les sites e-commerce, dans les points de vente que sur les réseaux sociaux.

Par ailleurs, les retours de la communauté engagée sur TikTok peuvent éclairer le développement des futures campagnes et l’innovation produit. Finalement, la majorité des entreprises et des secteurs ont intérêt à tirer parti d’un dispositif amélioré pour détecter les tendances sur les réseaux sociaux, et particulièrement sur TikTok.

 

Vous souhaitez en savoir plus sur les dispositifs permettant de détecter des tendances sur TikTok ? Contactez nous !

Social Data à l’ere des chambres d’écho : Perspective d’une analyste

Social Data à l’ere des chambres d’écho : Perspective d’une analyste

En 2024, l’influence des médias sociaux sur nos comportements ne fait aucun doute. Près de 64% de la population mondiale est active en ligne, évoluant dans un paysage numérique toujours en transformation. L’Insights Analyst joue un rôle crucial : il doit naviguer dans un océan de données issues des réseaux sociaux pour en extraire des informations pertinentes et exploitables, des insights précieux.

Mais attention : depuis le contenu que nous voyons, jusqu’aux commentaires qui apparaissent, les algorithmes qui façonnent nos expériences sur ces plateformes rendent essentiel de regarder au-delà de ce qui est présenté au premier coup d’œil.

 

Le défi des chambres d’écho et des perceptions biaisées

Imaginez-vous dans une salle aux miroirs, où chaque reflet renforce votre propre image. C’est ainsi que fonctionnent les chambres d’écho en ligne. Elles créent un environnement où nos opinions sont constamment amplifiées, donnant naissance à un phénomène psychologique trompeur : l’illusion que nos points de vue sont plus répandus qu’ils ne le sont réellement. Le résultat ? Une « illusion de la majorité » qui peut fausser notre compréhension de la réalité en ligne.

Pour comprendre véritablement le sentiment public, et comprendre les comportements des internautes, il est essentiel de comprendre ce biais des chambres d’écho qui influence l’émergence des tendances. Finalement les internautes analysés évoluent au sein de bulles déjà biaisées. Les analystes ne doivent pas se laisser emporter par ce même biais.

La quête d’une image fidèle des opinions en ligne

Les deux biais cognitifs majeurs sont: « l’illusion de la majorité » et « l’effet de faux consensus ».

L’illusion de la majorité est un phénomène psychologique qui pousse les individus à croire que leurs opinions sont plus partagées qu’elles ne le sont en réalité. Cet effet est renforcé par l’exposition quasi exclusive à des contenus similaires aux nôtres, créant ce que l’on appelle des chambres d’écho. L' »illusion de la majorité » peut fausser notre compréhension, les voix les plus fortes et les plus visibles donnant souvent l’impression d’être majoritaires alors qu’elles ne le sont pas réellement.

Au-delà des contenus que nous voyons dans nos feeds, les algorithmes des plateformes peuvent aussi cibler quels commentaires sont vus au sujet de ce contenu. C’est ce que l’on appelle « l’effet de faux consensus » : il nous conforte dans l’idée que nos opinions sont non seulement valides, mais aussi largement partagées, alors qu’elles sont souvent marginales. Notre dépendance aux réseaux sociaux crée une réalité filtrée par les algorithmes.

Cela peut ainsi donner l’impression aux internautes que certaines opinions ou tendances sont plus répandues qu’elles ne le sont réellement. Parfois un décideur marketing/communication qui n’emploie pas d’outils de social listening peut se retrouver piégé par ces biais.

Face à cette réalité « filtrée » comment obtenir une vision objective des opinions et des tendances en ligne ?

Pour mieux appréhender la perception réelle d’un sujet, qu’il s’agisse d’une campagne, d’un produit ou d’une opinion, il est essentiel de reconnaître que notre vision personnelle du sujet ne constitue pas une image complète ou précise de la globalité du sujet. L’illusion de la majorité peut faire passer n’importe quelle opinion pour une tendance dominante, mais cela ne signifie pas qu’elle reflète l’opinion majoritaire.

En tant que dirigeant d’organisation, ou professionnel des insights, du marketing, de la communication… il est crucial de prendre en compte ce biais, pour

  • remettre en question les récits rencontrés en ligne et rechercher activement des perspectives diverses
  • éviter de considérer chaque tendance sur les réseaux sociaux comme un phénomène culturel global touchant tout le monde.

Les tendances peuvent être utiles pour concevoir des produits ou des campagnes de pub, mais pour les exploiter efficacement, il est nécessaire d’identifier les communautés en ligne spécifiques d’où elles émergent.

Certaines personnes choisissent de garder le silence en ligne sur des sujets controversés, alors que d’autres expriment leur opinion sur des thèmes plus ou moins sensibles. S’appuyer sur un faux consensus est un risque pour les marques. Cela peut rapidement passer d’un simple malentendu à une véritable crise de réputation.

Les dirigeants d’organisations et les professionnels du marketing ne devraient pas supposer que ce qu’ils observent reflète les perceptions de l’ensemble de leur public cible au risque de créer des campagnes qui manquent leur objectif. Pour créer lien authentique avec la cible d’une marque, il est crucial d’aller au-delà des apparences en menant des études approfondies sur les différentes communautés.

Dépasser les chambres d’écho : une méthode holistique 

Pour relever ces défis, j’utilise une méthode en trois volets conçue pour capturer l’essence véritable des discussions en ligne. Il est essentiel de dépasser les chambres d’écho et de combiner différentes sources d’analyse. Voici une méthode structurée en trois volets qui permet de mieux comprendre l’ensemble des conversations et des perceptions :

 

01. Analyse des conversations en ligne :

  • Suivre les tendances dans le temps : identifier ce qui a fonctionné ou non, et pourquoi.
  • Examiner les indicateurs clés : analyser non seulement la portée, l’engagement et le volume de publications, mais aussi le ton, le contenu et les émotions derrière chaque échange.
  • Explorer les données démographiques des auteurs : elles fournissent des informations précieuses sur les communautés liées à des thèmes spécifiques, même si cela ne présente qu’une partie d’un ensemble plus large.

02. Comprendre l’audience et les communautés en son sein :

  • Segmenter pour personnaliser : Utiliser les données comportementales pour adapter vos messages et offres, en créant un lien plus profond avec chaque communauté ou groupe.
  • Identifier les opportunités : En explorant des segments sous-représentés, on peut non seulement étendre la portée mais aussi innover en fonction des attentes spécifiques de ces publics.
  • Renforcer la fidélité : Une approche granulaire et ciblée vous permettra d’améliorer la pertinence de vos contenus et de bâtir une communauté fidèle autour de votre marque.

03. Exploiter les modèles de recherche :

  • Anticiper les besoins non exprimés : Analyser les comportements de recherche (sur les moteurs de recherche) pour détecter les lacunes dans votre offre ou les questions non résolues.
  • Comprendre les « audiences silencieuses » : Ces consommateurs qui interagissent peu ou pas avec la marque, mais qui recherchent de l’information sur les moteurs, peuvent fournir des informations essentielles sur leurs préoccupations et leurs attentes.
  • Etre proactif : Exploiter ces insights permet d’anticiper les tendances émergentes et de prendre des décisions stratégiques avant vos concurrents.

Nous sommes convaincus que c’est en combinant ces 3 approches de manière holistique que l’on peut obtenir la vision la plus complète

L’équilibre est la clé. En combinant une vue d’ensemble des internautes avec une analyse fine des personnalités en ligne – y compris les discussions, les communautés, et les recherches – tout en tenant compte du contexte du monde réel, nous pouvons obtenir une image plus précise de la réalité des consommateurs et des parties prenantes.

Cette approche holistique permet d’aller au-delà du bruit généré par les groupes les plus visibles en ligne. Elle offre aux marques la possibilité de se connecter avec les audiences silencieuses, dont les voix sont souvent noyées dans le tumulte des médias sociaux.

En fin de compte, c’est cette compréhension nuancée et contextualisée qui permet aux marques de développer des stratégies qui résonnent véritablement avec leur public, tout en naviguant habilement dans les eaux parfois troubles des médias sociaux.

 

Si votre marque souhaite une vue équilibrée et complète des sujets d’intérêt affectant son organisation, et qui reflète mieux la complexité et la diversité de l’expérience de ses communautés en ligne, vous pouvez nous contacter. Nous proposons un accompagnement de vos équipes d’experts en appliquant notre approche holistique.

Comprendre les Pessi et leur mode d’action

Comprendre les Pessi et leur mode d’action

Avez-vous déjà croisé, sur X/Twitter, un internaute dont l’étrange photo de profil est un photomontage de Lionel Messi chauve ? Vous étiez sans doute en présence d’un Pessi. Quelle est cette communauté de trolls français, et quelles sont leurs actions en ligne ?

D’une communauté de fans de foot aux « trolls » organisés

L’origine du mouvement se retrouve dans la culture foot d’Internet en 2020. En effet, le nom « Pessi » fait référence aux penalties ratés par le joueur argentin. Les internautes se reconnaissent entre eux et affichent leur appartenance à la communauté en utilisant des photos détournées de Messi, des pseudos composés de jeux de mots basés sur le nom du groupe, ou des mots dont la première lettre a été remplacée par un P.

Mais au-delà des montages photo et des pseudos, la communauté perd rapidement son lien avec le football. Elle s’envisage comme une armée digitale prête à lancer des raids contre les personnalités (comme Cyril Hanouna ou Elon Musk) et les marques qu’ils considèrent problématiques ou avec lesquelles ils ne partagent pas le même avis. Ces raids sont des campagnes qui consistent à commenter le plus possible la dernière publication du compte ciblé, souvent avec des messages sans lien direct avec les raisons du raid. Par exemple, les Pessi sont très friands de la plaisanterie « -quoi ? -feur ».

Photomontage à l’origine de nombreuses photos de profils et de memes de Pessi.

Une véritable force de frappe en ligne

La locution « feur » a été tweetée plus de 1.2M de fois depuis le 1er septembre 2023. Les pics de posts visibles sur la chronologie ci-dessous illustrent des raids. Le pic le plus important correspond à la campagne menée contre Mila. On décompte 110K commentaires sur la publication prise d’assaut par les Pessi, quand la plupart des posts de Mila cumulent moins de 1K commentaires.
Chronologie des publications mentionnant « feur » sur X/Twitter

Nombre moyen de commentaires postés par un Pessi

Bien que ces volumes soient impressionnants, il s’agit en général d’un petit groupe de Pessi qui produit la majorité des commentaires. En effet, depuis le 1ᵉʳ septembre 2023, les 1.2M de posts ont été publiés par 15.4K auteurs uniques, postant ainsi en moyenne 71 commentaires chacun. Le Pessi le plus prolifique, Soldat Pessi, a publié 4.5K tweets à lui seul sur la période étudiée.

Quand les marques sont tourmentées par les Pessi : l’exemple de Carrefour

En mai 2023, les Pessi organisent le premier raid contre une marque. La raison de cette campagne : la branche israélienne de Carrefour inciterait « au terrorisme contre la Palestine » en omettant le territoire sur un tract publicitaire. La date choisie est le 17 mai, et la dernière publication de l’enseigne en devient donc la cible.
Le post de Carrefour est commenté 34K fois. C’est 515 fois plus que le nombre moyen de commentaires des publications de la marque.

Le raid reprend les codes traditionnels de la communauté. Ainsi, quelques internautes produisent une majorité des commentaires, qui sont souvent humoristiques et en lien avec l’univers des Pessi. Quelques personnes rajoutent aussi une référence à la raison du raid, ce qui est plutôt rare. Autre changement notable dans l’organisation de cette campagne : les Pessi l’ont partagée en amont sur des canaux publics, dont X/Twitter. Les raids suivants se sont préparés sur des réseaux privés, potentiellement Discord ou Telegram.

Carrefour n’a pas réagi à l’attaque en ligne, et la publication est toujours disponible sur le compte Twitter de l’enseigne. Les Pessi n’ont pas réitéré d’attaques vis-à-vis de la marque depuis.

Publication ciblée au cours du raid contre Carrefour
Les raids de Pessi sont imprévisibles mais peuvent avoir des répercussions sur l’image de votre marque. Toutefois, bien que le volume de publications puisse impressionner, il est par conséquent important de surveiller d’autres KPI, comme le nombre d’auteurs par exemple, afin de différencier une simple opération « troll » d’une véritable mobilisation du grand public. Digital Insighters vous accompagne dans l’anticipation et la gestion des crises e-réputationnelles. Contactez-nous pour profiter de notre expertise en culture Web et du social listening.
Comment la fake news de Vincent Flibustier sur CrowdStrike est devenue virale ?

Comment la fake news de Vincent Flibustier sur CrowdStrike est devenue virale ?

Le 19 juillet 2024, une mise à jour défectueuse du logiciel de sécurité de CrowdStrike a provoqué le crash de 8,5 millions d’ordinateurs sous Windows. Cela a entraîné la plus grande panne informatique de l’histoire. Cette coupure a touché divers secteurs à l’échelle mondiale, perturbant surtout les compagnies aériennes, les banques, les hôpitaux et les services gouvernementaux. Le préjudice financier est estimé à au moins 10 milliards de dollars.

D’après Cirium, qui se présente comme « la source la plus fiable au monde en matière d’analyse aéronautique », 5 078 vols, soit 4,6 % des vols programmés ce jour-là, ont été annulés à l’échelle mondiale.

 

Mais c’était quoi le bug en fait ?

Rapidement, sans rentrer dans les détails trop techniques, la mise à jour de CrowdStrike a entraîné l’entrée des ordinateurs dans une boucle de redémarrage. L’erreur a été identifiée en quelques heures et un correctif a été déployé, mais celui-ci est assez complexe à réaliser pour une personne dont ce n’est pas le métier.

Un utilisateur Windows subissant le problème CrowdStrike

Un sentiment de panique généralisé

Tout cela a engendré un climat de panique en ligne, avec des entreprises et des employés incapables d’accéder à leurs outils de travail. A titre de comparaison en seulement 24 heures, on a compté 2,3 millions de conversations, soit un peu moins que le nombre de discussions qu’il y a eu en une semaine autour des JO de Paris 2024, qui s’élève à 2,8 millions.

Mentions CrowdStrike & Paris 2024

Dans ce contexte, Vincent Flibustier tweete une fake news ajoutant au chaos

L’absence de communication claire a exacerbé les tensions, ajoutant à la confusion générale et à la sensation de chaos numérique. Et c’est sur cette situation que Vincent Flibustier, formateur en citoyenneté numérique et spécialiste en « fake news », a réussi à surfer. Avec son photo montage, il a fait croire que c’était son premier jour chez CrowdStrike et qu’il venait de faire une mise à jour avant de prendre son après-midi.

Sur X, les internautes ont spéculé sur les causes de ce bug

Dans ce climat de panique totale, mêlant manque d’information, tension et blague, sa fake news s’est propagée rapidement sur X, notamment auprès des internautes peu suivis / non influenceurs. Seuls deux comptes avec plus d’abonnés qui lui (300K et 200K) ont relayé son post, ce qui ne peut justifier à lui seul l’ampleur de l’écho en ligne.

Lui-même donne plusieurs raisons expliquant pourquoi cela a fonctionné :

  1. Aucun coupable n’a encore été désigné.
  2. Le coupable apparent est perçu comme « idiot ».
  3. Les gens ont besoin d’informations inédites.
  4. La fake news est écrite en anglais pour une plus large diffusion, et surtout c’est une communauté qui ne sait pas qui il est.
  5. Détournement de l’attention avec les doigts de nain, ce qui fait qu’on se concentre moins sur le mauvais déroutage.
  6. Le biais de confirmation : « L’information me plaît, elle est donc vraie ».
  7. La fake news est poussée par une communauté qui sait que c’est une blague.

Et c’est certainement le fait d’avoir communiqué en anglais qui a contribué à faire de cette publication un véritable buzz. En effet, les mentions émises depuis les États-Unis représentent plus de la moitié des conversations sur le sujet, suivis par les mentions émises depuis la Turquie et le Japon.

Part des mentions sur CrowdStrike
Part des mentions sur la publciation de Vincent Flibustier

On retrouve une audience similaire chez les internautes ayant relayé le tweet de Vincent Flibustier par citations ou retweet. Près de la moitié proviennent des États-Unis, suivis du Japon, puis de la France, sa communauté.

Quid de la réaction de CrowdStrike ?

À la suite de cet évènement, l’entreprise a cherché à être la plus transparente possible sur ce qui est arrivé en publiant un long rapport détaillant ce qui a mal tourné et pourquoi. Elle s’est engagée à améliorer ses méthodes de test pour éviter de futures erreurs et offre. Ce rapport est mis en avant en haut de leur site, accompagné d’un message d’excuse du CEO de CrowdStrike, George Kurtz.

En revanche, il n’est pas certain qu’il ait été judicieux de mettre en avant les bons d’achat de 10 dollars de crédits Uber Eats offerts aux employés pour le « travail supplémentaire » fourni pour aider les clients de CrowdStrike. D’autant plus que certains de ces bons d’achat étaient invalides…

La gestion de crise de CrowdStrike souligne l’importance de la réactivité en ligne. C’est ainsi que chez Digital Insighters nous décryptons les événements marquants, en remontant les origines de l’événement en ligne pour mieux en comprendre les mécaniques, afin de pouvoir réagir en adéquation.